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Sur ce banc
Quand je passe sous ce pont
c'est tout mon corps qui se braque
il n'y a plus de cartons
plus rien de son bric à brac.
Sur le banc il était là
René c'était un mec bien
toujours à dire "ça va?"
René c'était mon copain.
Ici c'était son domaine
il t'y racontait sa vie
celle d'avant ses déveines
quand il avait des amis.
Il te lisait ses voyages
dans les bandes dessinées
de ses nombreux tatouages,
seul bien qu'il eut possédé.
Il avait couru le monde
derrière des chars d'acier
pour une paix vagabonde
qu'il n'a jamais pu trouver.
C'était ses dernières guerres
qui l'avaient poussé ici
jusqu'au bout de ses misères
à manger du pain rassis.
Toujours prêt à partager
même ce qu'il n'avait pas,
de ses rires édentés
il chantonnait d'être là.
Et moi j'aimais me poser
pour parler de tout, de rien
cinq minutes d'amitié
c'est fou com' ça fait du bien!
Mais il est parti depuis
vaincu par "la sale grippe",
c'est sûr maintenant il vit
au pays des braves types.
Si le banc est déserté
un autre viendra sans doute,
la rue est très fréquentée,
pour y terminer sa route.
Si tous les Renés du monde
pouvaient se donner la main
on entrerait dans la ronde
de l'amour de son prochain...